DAW Books :: 2007
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The Name of the Wind reprend donc tous les poncifs du roman d'apprentissage, lui-même très commun en fantasy. Cependant, Rothfuss s'y montre en phase avec la génération contemporaine des écrivains issus de cette littérature. Comme eux, il cherche à apporter une touche plus adulte à ses intrigues, à son écriture, à ses univers et à ses personnages. Ces derniers, en effet, sont complexes. Ils ont des failles, ses héros les premiers : Kvothe, qui souffre parfois d'un péché d'orgueil ; et Denna, la femme dont il est épris, qui est à peu de choses près une courtisane. Quant à leurs relations, leurs états d'âme, leurs envies, leurs frustrations et leurs jalousies, ils sont décrits avec soin et avec psychologie.

Le cadre de l'histoire bénéficie du même traitement subtil. Si l'univers qui sert de cadre à cette histoire n'est pas décrit dans le détail (l'action se passant pour l'essentiel à l'Université d'Imre, et plus secondairement dans les rues de Tarbean, une cité de la même province), le système de magie, lui, l'est. Baptisé "sympathie", il est en fait une sorte de télékinésie, mêlée à quelques éléments de chimie et d'alchimie, et il s'insère dans un contexte quasiment scientifique. C'est un art en soi, difficile, délicat à manier, dangereux et pas toujours spectaculaire.

Enfin, l'intrigue est bien conçue, jouant habilement d'allers et de retours entre deux époques : l'actuelle, avec un Kvothe jeune retraité, ancien héros légendaire dissimulant son identité sous les traits d'un aubergiste ; et le passé, le sien, qu'il entreprend de raconter à un scribe. Les deux temps sont marqués par une menace commune, qui se manifeste à l'époque du récit de plusieurs manières (invasions de créatures étranges, personnage possédé par on ne sait quel démon), mais que l'on imagine liée aux créatures qui ont tué les parents de Kvothe, les Chandrian. A cela, s'ajoute un troisième temps encore, le passé lointain où ces derniers, dont il ne reste aujourd'hui que quelques traces dans des livres perdus ou des comptines pour enfants, sont apparus.

The Name of the Wind est bien conçu, mais il a aussi les défauts de ses qualités. Son excès de psychologie, sa manière d'étirer le temps, son caractère parfois contemplatif, son quasi refus de scènes spectaculaires (lequel se traduit, chose rare dans ce genre littéraire, par une absence d'apothéose), appesantissent le récit. On verse dans la fantasy psychologique, à la Robin Hobb, avec tout ce que cela induit de longueurs, de trivial, voire de mièvre (franchement, cette relation platonique avec Denna, ou plus généralement, la relation de Kvothe aux femmes, quelles plaies...).

Pour qui n'y est pas préparé. Pour qui recherche du sang, de l'action, de l'intrigue, de la politique, des grandes idées, de la profondeur et de la perspective historique, toutes choses que la fantasy distribue bien souvent de manière prodigue, The Name of the Wind peut parfois virer au pensum. Alors, autant être prévenu.