Dix ans maintenant, que l'on attend The Thorn Of Emberlain, le quatrième volume de la série de Scott Lynch The Gentleman Bastard. Et ça n'est jamais bon quand un auteur prend trop de temps pour écrire une suite. Parlez-en donc à George R. R. Martin. Cela veut dire, souvent, que quelque chose manque. L'inspiration, ou la motivation, qu'importe. Quelque chose qui affectera sans doute la qualité du prochain livre, si d'aventure il finit par voir le jour. Quelque chose qui, de fait, a déjà impacté le troisième tome, sorti lui-même six longues années après le second, alors que douze mois seulement avaient séparé les deux premiers volumes.
En effet, on s'ennuie déjà avec The Republic Of Thieves.
Cela s'annonçait bien, pourtant, puisqu'après l'aparté maritime de Red Seas Under Red Skies, ce roman renoue pour de bon avec l'intrigue mise en place dans The Lies Of Locke Lamora, le premier volume de la saga, à ce jour le meilleur. Les bondsmagi, ces magiciens dont Locke, le héros, est devenu l'ennemi, sont à nouveau au cœur de l'histoire, alors qu'ils n'étaient apparus qu'à la fin, en arrière-plan, dans le tome précédent. Dans la grande tradition de la fantasy épique, l'avenir du monde semble en jeu. On en apprend un peu plus sur les périls qui le menacent, et sur le rôle central de Locke dans tout cela. Des révélations sont faites sur ses origines. Et puis surtout, ce dernier retrouve Sabetha, le personnage féminin de sa bande d'escrocs, et l'amour de sa vie.
Les manigances des personnages prennent place encore une fois dans un nouveau cadre, à savoir Karthain, la cité des bondsmagi, et elles changent du tout au tout. Après avoir entrepris l'escroquerie du siècle dans le premier volet, puis écumé les mers dans le second, Locke et son fidèle compagnon Jean ont pour objectif de manipuler un vote. Ils doivent donc convaincre les électeurs de rejoindre leur camp, discréditer leurs opposants, corrompre quelques personnages influents et se livrer à d'autres manipulations encore. Mais pour corser les choses, Sabetha est chargée des mêmes manœuvres dans le camp d'en face. Locke se voit donc contraint d'affronter celle qu'il souhaite reconquérir et qui, par ailleurs, connaissant toutes ses ficelles d'arnaqueur, est un adversaire à sa mesure.
Cette histoire se double d'une autre, un long flashback, qui occupe presque autant de pages que l'intrigue principale, et qui nous ramène au temps d'avant le premier livre, quand Locke, Sabetha, Jean ainsi que les jumeaux Calo et Galdo, étaient encore de jeunes criminels entrainés et menés par Father Chains. Dans ce récit, après un long préambule qui raconte l'enfance de Locke, les jeunes malfrats ont pour mission de monter avec succès une pièce de théâtre pour le bénéfice d'une compagnie d'acteurs aussi haute en couleur qu'incontrôlable.
Les deux histoires sont originales, dans le cadre pourtant large de la fantasy. On pourrait s'attendre à ce que Scott Lynch y déploie pleinement l'étendue de ses talents. Mais, nous sommes loin du compte. Les deux récits sont dominés, en vérité, par l'histoire compliquée entre Locke et Sabetha. C'est donc une longue suite de malentendus, d'incompréhensions et, parfois tout de même, d'amour authentique, une grande partie épuisante de "je t'aime moi non plus", qui domine ce long livre qu'est The Republic Of Thieves.
Dans ce troisième volume du Gentleman Bastard, apparaissent encore plus les limites de l'auteur : sa propension au délayage, aux longueurs, au remplissage, comme ces passages, inutiles à l'intrigue, où les personnages se délectent des différents arômes des vins qu'ils se plaisent à boire. Les dialogues sont nombreux et ils s'éternisent. Les rebondissements romanesques ne sont que des détours, comme quand Sabetha parvient à éloigner Locke et Jean sur un bateau, et qu'ils reviennent dare-dare à Karthain, en deux temps trois mouvements. Les manœuvres politiques auxquelles se livrent les trois personnages n'aboutit à rien de sensationnel ou d'inattendu. La fin, loin d'être l'apothéose espérée avec ce type de longs romans de fantasy, n'a rien de prenant ni de sensationnel. Bref, on s'ennuie ferme.
The Republic Of Thieves, au fond, est un pensum. Et il est déjà clair, à sa lecture, que Scott Lynch n'a déjà plus grand-chose sous la pédale.
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