C’est l’histoire banale du type qui abandonne son train-train ordinaire pour une vie d’aventures et d’imprévus. Mais celui-là vit les joyeuses péripéties imaginées par Paasilinna et traverse la Finlande avec un lièvre sous le bras.
WSOY / Denoël :: 1975 / 1989 :: acheter ce livre
Traduit du Finnois par Anne Colin du Terrail
Une nuit, de retour d’un reportage, Vatanen percute un lièvre qui traversait la route. Désolé, le journaliste sort de son véhicule, récupère l’animal blessé et lui confectionne une attelle de fortune. Et puis soudainement, au beau milieu du bois où il s’est enfoncé pour soigner sa victime, il réalise que sa vie actuelle ne vaut pas vraiment la peine d’être vécue. Sur ce constat, il plante son véhicule et le collègue qui s’y trouvait et s’enfonce seul dans la forêt, en direction du nord. Commence alors un long périple à travers la campagne finlandaise, une escapade parsemée d’aventures cocasses qui le conduit en Laponie puis en Union Soviétique.
Le Lièvre de Vatanen, c’est l’histoire habituelle du retour à la nature, un roman écologique qui va bien avec les années 70 où il a été écrit et qui en est devenu culte dans son pays d’origine. Mais c’est avant tout pour les aventures rocambolesques vécues par le héros que l’ouvrage vaut le détour. Au cours de ses pérégrinations, Vatanen sympathise avec un ancien flic convaincu qu’un imposteur a pris la place du président finlandais, il sauve son lièvre des mains d’un moniteur de ski adepte des rites sacrificiels des Finnois primitifs, il se lance dans une lutte épique contre un corbeau, il prend une cuite avec un bouilleur de cru au beau milieu d’une forêt en feu, il recèle des armes de la Seconde Guerre Mondiale trouvées au fond d’un lac et il se fait courser par deux molosses qui en veulent à son animal et par toute une assemblée en pleine biture. Et il s’en passe encore une dizaine d’autres comme ça.
Jamais le narrateur ou le héros n’explique pourquoi cette nouvelle vie vaut mieux que l’ancienne, jamais il n’argumente sur les vertus de ces vagabondages dans le Grand Nord. Il n’est même pas certain que ces vertus existent, à en juger par les déboires que connaît Vatanen. Un corbeau le détrousse, un ours manque de l’éventrer, des gens veulent lui prendre son lièvre, et pour finir, on le jette en prison. La vie à la campagne et sur la route n’est pas de tout repos. Mais l’atout de Vatanen, c’est de ne jamais se laisser empoisonner par le passé ou par le futur. Il devient un homme simple, il ne pense plus qu’à son lièvre et à l’instant présent, qu’il soit fait de peine ou de joie, et prend les plus grandes décisions avec une spontanéité déconcertante.
L’autre atout de Vatanen dans cette nouvelle vie, c’est le lièvre. Il est son passeport vers l’autre monde, celui des originaux auquel tout ou presque est accordé et excusé. Grâce à l’animal, l’attitude des gens ordinaires change, ils s’attendrissent, ils se sentent le droit de ne plus agir selon les conventions sociales. La petite bête facilite l’entrée du journaliste errant dans le monde des marginaux, il lui permet de sympathiser avec les personnages les plus hauts en couleur de Finlande. Le lièvre est sa clé vers cette autre vie où, Passilinna l’a montré dans d’autres romans, il est finalement si facile d’accéder.
Fil des commentaires
Adresse de rétrolien : https://balzac.fakeforreal.net/index.php/trackback/456